« Dieu et mon droit »

Telle est la devise du souverain britannique depuis Henri V (1413-1422) qu’il m’apparaît utile de rappeler au moment où le Royaume-Uni quitte l’Europe. A partir de l’invasion normande le français avait pourtant pris sa place outre-manche, Henri V était de plus bilingue et se considérait comme le roi légitime de la France, descendant en ligne directe de Philippe IV le Bel par la fille de ce dernier Isabelle de France. D’où la guerre de cent ans  déclenchée par son ancêtre Édouard III. L’Angleterre était donc bien consciente de ses racines européennes et les revendiquait même au travers de sa prétention à la couronne de France. Ce serait donc une erreur historique que de l’imaginer désintéressée de l’Europe. Tout en feignant un certain orgueil insulaire, d’autant plus marqué qu’il fallut du temps pour construire sur l’île le Royaume-Uni, elle se trouva en fait en concurrence avec la France, non seulement pour l’héritage de la couronne capétienne, mais encore pour exercer un certain contrôle sur la politique continentale.

C’est l’entente cordiale amorcée sous Louis-Philippe en 1841 et 1845, puis complétée sous la IIIème république en 1904 qui réconcilia la France et l’Angleterre, ouvrant tout naturellement à celle-ci la place européenne qui lui revenait. Elle l’occupa glorieusement et fidèlement pendant les deux guerres mondiales. De Gaulle dans les années 1960 la maintint en dehors du marché commun parce qu’il la sentait trop liée aux États-Unis. Après ce fut l’entrée en 1973. Adaptée cependant au particularisme anglais. De plus, ironie du sort, l’Angleterre joua le principe gaulliste de l’Europe des patries. Elle garda sa monnaie, ce qui était sage puisqu’il n’y avait pas de véritable gouvernance économique commune ! Quant aux institutions, il suffit de se souvenir du triple  » No » de Margareth Thatcher à Jacques Delors sur la souveraineté des institutions européennes sur les nationales ! Le pays de sa gracieuse Majesté ne disait pas non à l’Europe des affaires, la city en sait quelque chose, mais pas à n’importe quel prix ! Il ne faut jamais oublier l’importance des traditions en Angleterre, ni le sens de l’honneur ! Certes les anglais ont coupé la tête de leur roi, Charles 1er, mais c’était là le résultat d’une révolution entre chrétiens, et le général Monk, qui fut un peu leur Bonaparte, se dépêcha de rappeler sur le trône le fils du roi défunt ! Les français agirent tout autrement ! Notre bourgeoisie, comme celle d’outre-manche, dirige le pays depuis la révolution ! Mais elle le fait dans le rejet de sa culture et de son passé. Se comportant comme une enfant dégénérée sa mentalité peut se résumer à la signification du calendrier révolutionnaire. Il faisait commencer la France à l’an I de la République, comme si auparavant, il n’y avait eu que le néant. Attitude inimaginable en Angleterre.

De plus cette classe dominante était dans le fond de son âme voltairienne. À cause du grand mépris dans lequel elle tenait la Bible, attitude elle aussi inconcevable au Royaume-Uni, Dieu et la morale ne servaient à ses yeux qu’à conserver l’ordre social, maintenant le monde ouvrier dans la misère. Cette situation injuste lui permettait la réalisation de plus grands profits. Sourde à la doctrine sociale de l’Eglise, elle n’a même pas su par de grandes œuvres de charité répondre aux problèmes les plus urgents de la pauvreté extrême, comme le faisaient les anglais. Dans un petit livre remarquable écrit en 1940, en prison, Léon Blum, qui fut président du conseil au moment du Front populaire en 1936, réfléchit aux causes de la défaite de 1940. Plusieurs de ses remarques demeurent d’une grande pertinence, notamment sur l’esprit décadent en matière de morale et de culture qui avait détourné la bourgeoisie de France de ses devoirs. Aussi le grand leader socialiste fait-il appel à la morale : « Révolution morale, j’emploie ces mots à dessein ; ils désignent le foyer même du mal dont la bourgeoisie française meurt sous nos yeux. L’organe atteint en elle sans recours, celui dont le trouble a peu à peu gagné tous les autres est bien la faculté morale… Les formes rigides de son ancienne probité se sont effacées au frottement des « affaires modernes ». Au temps de Birrotteau, du Père Goriot, et même au temps de monsieur Poirier, chacun trouvait naturel qu’un failli se brulât la cervelle. L’honneur résidait dans la signature commerciale, mais du moins y avait-il quelque part un honneur… La bourgeoisie française a usé cet honneur-là. Elle a perdu le sentiment intime de sa dignité. Elle a perdu l’énergie, la vigueur créatrice de l’intelligence qui supposent toujours en quelque mesure l’honneur, la dignité, la satisfaction de soi-même. C’est par la détérioration des vertus privées qu’elle a perdu sa vertu publique. »

Si nos dirigeants politiques veulent retrouver quelque estime et quelque crédit parmi leurs concitoyens, ils feraient bien de s’inspirer de cette dernière maxime sur les vertus, en particulier ceux qui se présentent comme les héritiers de Léon Blum.

Au fur et à mesure qu’on s’est éloigné de l’Europe voulue par De Gaulle et Adenauer, qui se référaient volontiers aux racines judéo chrétiennes de l’Europe, on a relégué un certain nombre de valeurs au rang de vieilles lunes, on a abouti à un conglomérat sans foi ni loi (morale), amnésique quant aux fondements de sa culture. On s’est imaginé que le multi culturalisme et le brassage des communautés aideraient à cette grande désorganisation iconoclaste, délice de nos transgresseurs modernistes, de droite comme de gauche, parce que détruisant le christianisme.

L’Angleterre, forte de son expérience coloniale a cru, un temps, pouvoir céder à cette mode, mais en la contrôlant, et l’Allemagne a été, jusqu’à présent sur la même longueur d’onde. Mais voilà que la donne est différente ! On réalise que la grande migration actuelle n’a rien à voir avec les précédentes ! L’islamisme est de la partie ! Cela n’a pas échappé à l’esprit pragmatique anglais ! Les idéologues français imbus de leur mesquinerie laïque et républicaine y ont vu l’occasion de détruire un peu plus notre civilisation aux dépens de l’Infâme qu’il fallait écraser !

Écoutons encore Léon Blum : « Pourquoi la bourgeoisie française a-t-elle montré cette incapacité d’acclimatation qui la fait dépérir, alors que dans d’autres secteurs de la classe bourgeoise, dans les pays anglo-saxons par exemple, on trouvait moyen sans trop de peine d’ajuster le comportement moral au progrès de l’évolution économique ? Le contraste tient peut-être à la différence des types nationaux, sans doute aussi à l’importance que certains éléments religieux ont conservé dans la formation et dans l’éducation de la bourgeoisie anglo-saxonne. » Eh oui, Léon Blum, en homme de culture et en bon connaisseur de l’histoire accorde de l’importance à l’éducation religieuse. Il marqua d’ailleurs toute sa vie un profond respect pour l’Eglise catholique et le Pape en particulier. Et pour le cas précis des anglo-saxons il ne se trompait pas. Jamais leur philosophie des lumières n’a atteint le degré de haine anti chrétienne de celle de la France dont nos actuels dirigeants sont les héritiers directs. Blum évoque des héros de Balzac. Pour ce qu’on appelle la pensée socialiste d’aujourd’hui, je pense à Flaubert et à son pharmacien de Madame Bovary, monsieur Homais.

La sortie de l’Europe d’un royaume de première importance qui a pour devise « Dieu et mon droit » pourra donc lui apparaître comme un bon débarras, même si cela n’est pas explicitement dit, diplomatie oblige ! Mais pour un chrétien de France et tout simplement ce que le 17ème siècle appelait « un honnête homme », ce départ marque plus fortement encore la mise en congé de Dieu et du droit dans ce qui ne mérite plus finalement que le nom de zone ! Pour combien de temps « euro » ? Et plus que jamais à vendre ! Je suis sûr qu’un prix de gros est possible en y ajoutant les chrétiens d’Orient qu’on continue à massacrer!

3 commentaires

  1. Il faut distinguer le jeune Blum porcidé notoire qui écrivit « du Mariage » pour exalter la destruction de notre société, du Blum d’après la captivité qui devait écrire « A l’échelle Humaine ». L’homme avait profondément changé, et il demanda même que les juifs ne gardassent pas rancune a une population Allemande que le nazisme avait fait mettre au banc des nations ! On ne doit considérer un homme que dans l’évolution de son existence. Céline toujours excessif a traité du Blum d’avant guerre. Mais il ne faut pas oublier que Céline a traité tout aussi ignoblement ses compatriotes du sud de la France. Il nous considérait comme des enjuivés, des feignasses et des métèques. Alors, son opinion…
    Alexis Arette, Combattant Volontaire. ( alexis.arette-hourquet@ orange.fr.

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